Toi et moi, jusqu'au bout du monde.

Jusqu'au bout du monde.

Levanah & Aesira.

Le Salvatore est amarré à Temerys depuis 1 semaine.

Levanah s’était absentée de longues journées et n’avait pas mis les pieds sur le Salvatore durant tout ce temps, ce qui n’était pas dans ses habitudes. La première raison de son absence était que la Capitaine avait dormi presque deux jours de suite pour se remettre de la traversée ralliant Fedja à son île natale. Elle avait abusé de sa magie pour orienter vents et vagues et raccourcir le temps de trajet autant que possible. La seconde raison était qu’Avitus s’était accaparé sa présence pour des raisons bien plus personnelles et la jeune demoiselle commençait à perdre pied sous cette quantité d’informations. Une nouvelle vie semblait s’offrir à elle, bien différente de tout ce qu’elle connaissait.. la peur, l’euphorie, la joie, la nostalgie, tout se confondait dans sa tête. Une seule personne était capable de remettre de l’ordre dans ses idées floues : Aesira Sinda, sa meilleure amie.

Les deux jeunes femmes étaient inséparables et partageaient leurs quotidien depuis des années. Sa guetteuse avait enduré bien des souffrances et leur détresse commune les avaient lié avec force l’une à l’autre pour ne plus jamais se quitter depuis. La perspective de quitter son poste de Capitaine pour des voyages plus ponctuels lui tordait l’estomac, l’angoisse d’être une mauvaise mère, n’ayant jamais eu la sienne pour prendre exemple, terminait de le broyer.

Sa grossesse devait rester secrète, un enfant hors mariage avec l’héritier Carrery ? Impensable ! Pourtant, le secret était trop lourd et Levanah connaissait les pires détails de la vie de son amie. Lorsque le soleil commença à se coucher, elle s’éclipsa du Palais qui l’accueillait ses derniers jours, avec pour seul bout de papier posé sur ton bureau “Je t’aime. Lev”… Avitus saurait où la trouver si besoin... mais l’absence d’indications concrètes lui donnait l’impression d’être toujours libre de ses faits et gestes et cela la rassurait, un peu. Tout allait si vite..

Vêtue d’une splendide robe de sa collection, les cheveux de nouveaux soyeux après des semaines en mer, Levanah grimpa à bord du Salvatore et s’empressa de rejoindre la proue pour poser sa main sur le bois endormi de sa Vivenef. L’entendait-il, même s’il ne pouvait répondre ? « Tu m’as manqué. » Ce navire était sa maison, son refuge, plus encore : sa famille.

Elle décocha à un coup de poing amical à Kyrell qui l’ébourriffa au passage. « T’as vu Aesira ? » « A l’arrière Capitaine ! Elle regarde ENCORE le couché de soleil. Quelqu’un peut-il lui dire que c’est un phénomène récurrent ? » lança-t-il avec camaraderie et humour.

Evidemment qu’elle regardait le coucher de soleil avec l’impression qu’il pouvait être le dernier… Elle s’était battue chaque jour pour survivre sans être certaine de voir la lumière le jour d’après. Levanah s’empara d’une bouteille de citronnade qui était distribuée sur le pont principal et s’en alla rejoindre son amie, presque une sœur, qui ne tarderait pas à la questionner : Pas de vin dans les mains de Levanah ? Du citron et de l’eau ? Hum.. louche cette affaire !

« Ma Dame, » dit-elle avec une révérence douteuse et sa bouteille en main. « Puis-je me joindre à vous ? » Elle ne put s’empêcher de rire. La sophistication ne lui allait pas si bien, mais au Palais, elle faisait des efforts.

La Capitaine vint se blottir derrière elle pour l’enlacer comme elle aimait le faire et laissa glisser ses yeux vers l’horizon pour s’emparer elle aussi des merveilleuses teintes orangées. « Tu vas bien Aesira ? Je t’ai manqué ? Au moins un peu ? » Un sourire apaisé étira ses lèvres. Avec elle, pas de faux-semblants, pas de secrets. Juste Levanah Sarao et Aesira Sinda..

@Aesira Sinda

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Jusqu'au bout du monde.

Kyrell pouvait bien continuer à se moquer. Si Aesira l’avait entendu, elle aurait certainement rétorqué qu’avec sa cervelle de poulpe, elle ne s’attendait pas à ce qu’il comprenne. Etait-il seulement capable d’apprécier la beauté de quelque d’aussi simple qu’un coucher de soleil ?

Crétin.

Aussi mordante soit-elle, la guetteuse du Salvatore avait appris à sincèrement apprécier Kyrell, son humour y compris. Elle s’y était habituée et savait que les taquineries de l’ancien pirate lui manqueraient, si toutefois l’avenir décidait de séparer leur chemin respectif.

Le coucher du soleil était un phénomène récurrent, c’est vrai – mais chacun d’entre eux était unique. Et puis, quoi de plus rassurant qu’une vision familière et immuable, alors qu’un vent de changement s’apprêtait à souffler sur son existence ? Aesira le ressentait au plus profond d’elle-même. La vie était loin d’être un long fleuve tranquille. Au contraire, elle s’apparentait plus à un océan capricieux, dont la houle n’allait pas tarder à frapper de nouveau. En bien ou en mal, ça... Le mystère restait entier.

Son frère était réapparu.
Sa meilleure amie et capitaine vivait une histoire d’amour passionnelle avec l’héritier Carrery.

Prétendre que tout allait demeurer comme avant serait idiot, en plus d’être foutrement naïf. Aesira peinait à savoir sur quel pied danser.

Des pas dans son dos lui annoncèrent que son moment de solitude touchait à sa fin. La demoiselle connaissait suffisamment chaque membre de l’équipage du Salvatore pour savoir, avant même de se retourner, que cette démarche appartenait à Levanah. La capitaine Stark lui apparut alors, plus rayonnante que jamais.

— Tu t’améliores, commenta-t-elle d’un sourire amusé face à la révérence de son amie.

Aesira s’était demandé comment Lev réussissait à supporter ces courbettes. Rien que de l’imaginer, sa patience était mise à rude épreuve. Elle, elle n’était qu’une souillon bien loin de la vie et des belles manières du duché, et rien que pour garder sa liberté de mouvement, elle se promit de le rester.

— Tu peux, mais seulement parce que je vois que tu as apporté de quoi se désaltérer !

Elle rit, mutine, sans avoir le temps d’observer de plus près la teneur de la bouteille, et accueillit avec plaisir l’étreinte de sa meilleure amie. Ce n’est qu’en sentant les muscles de son corps se détendre qu’elle prit conscience des tensions silencieuses qui l’habitaient. Aesira soupira en douceur.

— Bien sûr que tu m’as manquée...

Elle ferma les yeux un instant, sourire aux lèvres, pour s’imprégner de la préciosité de l’instant. Ces étreintes étaient bien plus éphémères que les couchers de soleil.

— Je vais bien, je crois... Mais, et toi ? Comme Malka nous a accompagnés jusqu’ici, je me suis dit que... Enfin...

Aesira pinça les lèvres. Avec la sœur de Lev, elle avait toujours plus ou moins l’impression de marcher sur des œufs. Elle gardait d’elle un souvenir amer et avait accueilli la nouvelle de son départ avec soulagement, à l’époque. Aujourd’hui, elle ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter de voir cette femme réapparaître.

Et si elle faisait une nouvelle fois du mal à Levanah ?

Et si elle s’accaparait sa meilleure amie, au point de l’effacer, elle ?

Non. Non, Lev ne la laisserait jamais tomber. C’était impossible et Aesira se refusait catégoriquement d’imaginer une telle hypothèse.

La guetteuse accrocha le regard de son amie et posa ses bras par-dessus les siens, sur son ventre.

— Qu’est-ce qui s’est passé avec ta sœur, Lev ?

Si elle avait tenu sa langue pendant toute la traversée, trop à cran pour être certaine de ne pas déclencher une dispute, à présent elle avait besoin que son amie éclaircisse le tableau. Si vraiment un changement s’annonçait, alors Aesira tenait à avoir toutes les cartes en main pour s’y préparer au mieux.

@Levanah Stark

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Jusqu'au bout du monde.

[i]Levanah & Aesira.

« De la citronnade.. j’ai apporté de la citronnade..» Levanah fit taire un rire malicieux car les deux femmes avaient l’habitude de boire du bon vin jusqu’à tard dans la nuit pour refaire le monde et se remémorer toutes leurs folles aventures en plus de quinze ans d’amitié et de proximité. Elle venait de rencontrer celui qu’elle considérait comme son âme sœur amoureuse, mais la brunette lovée entre ses bras, celle qui se cramponnaient à ses mains nouées à sa taille était depuis toujours son coup de foudre amical.

Aesira resta silencieuse quelques minutes et même si son regard n’était pas visible dans cette position, Levanah savait qu’elle avait de nombreuses questions à lui poser. Elle avait de nombreuses réponses à donner en échange… Sa vie prenait un virage qu’elle n’avait jamais imaginé, mais si beaucoup de choses allaient changer, son amitié resterait intacte.

« Elle m’a soigné. Malka m’a sauvé la vie. J’ai pris une flèche dans l’abdomen sur la grande place de Shova.. Sans elle, je ne serais pas là. Je sais que c’est compliqué entre vous deux, ça l’est aussi entre nous.. mais je lui suis redevable, je ne peux pas l’écarter. »

Car toute l’histoire était plus subtile encore qu’une simple guérison… La Capitaine pivote et colle son dos contre le bastingage pour se retrouver face à elle. Avitus lui a demandé de ne révéler son secret à personne pour ne pas détruire sa réputation, mais Aesira connaissait tous les détails sombres de son existence et lui cacher la plus belle nouvelle de sa vie était un fardeau beaucoup trop lourd à porter.

« Tu as toujours su garder mes secrets autant que je protège les tiens.. tu vas devoir en supporter un nouveau et me promettre de rester muette.. » Un large sourire se dessina sur ses lèvres suivi d’un soupir de soulagement. « Je suis enceinte. » Ses doigts se mirent à glisser sur la bague à son annulaire. Il ne s’agissait pas d’une alliance, mais d’une bague de famille offerte par l’héritier avant le voyage retour. Un symbole. Une promesse. « Et je vais me marier. » Par amour. Une alchimie qui n’échappait à personne ces dernières semaines, les deux Capitaines ayant passé le plus clair de leur temps ensemble et ruminer tout au long des rares séparations. « Je suis éperdument amoureuse de cet homme Aesira… Je ne veux pas envisager la suite sans lui.» Même si cela lui demandait de faire des ajustements.

Loin de se douter que son amie, elle aussi, traversait une étape complexe dans sa vie, elle enlaça ses doigts fins entre les siens et se noya dans ses prunelles sombres. Une femme guerrière se tenait face à elle, le genre de femme que l’on ne souhaitait pas défier ou mettre en colère.. elle avait traversé tant de choses affreuses.. « Mais je ne te laisserai jamais tomber, tu m’entends ? Aucun homme, ni aucun Palais ne m’empêchera d’être à tes côtés si tu as besoin de moi. Et ta présence reste indispensable… même si je vais devoir ralentir la cadence.»

En d’autres termes ; voyager moins. Depuis toujours, la Capitaine Stark rêvait de fonder une famille, sans doute pour combler cette jeunesse sans parent à ses côtés, pour connaître la chaleur d’un véritable foyer et dans peu de temps, son vœu le plus cher serait exaucé. Ses révélations soulevaient de nombreux sujets : comment organiser les livraisons ? Qui serait à la tête du Salvatore pendant ses absences ? Aesira voudrait-elle prendre le large ou mener ce navire ? Mais d’abord, elle avait envie de se réjouir à ses côtés. Pour une fois, sa sœur de coeur n’aurait pas à sécher ses larmes de tristesse, mais bien à profiter d’un rire authentique et dépourvu de souffrance.

@Aesira Sinda

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Jusqu'au bout du monde.

Un éclair d’incompréhension passa dans son regard, une demie seconde avant que son joli ne se fronce de dégoût. De la citronnade ? Mais... Mais quelle idée ?

— Tu es malade ? interrogea-t-elle comme si le breuvage acidulé s’apparentait au médicament le plus écœurant qui soi.

Quelque chose de louche se tramait, et si Aesira refusa de voir au-delà de ses œillères, ses soupçons s’effacèrent rapidement sous la douche glacée de son inquiétude. Elle voulait des réponses, et celles qu’elle obtenait allaient au-delà de ce qu’elle avait pu anticiper. Trop honnête pour l’épargner, Lev ne venait pas seulement lui avouer qu’elle avait failli mourir, elle lui apprenait aussi qu’elle ne devait la vie qu’à Malka. Malka ! Et elle, elle n’avait rien vu. Un mistral d’émotions se souleva en elle, sans qu’elle ne sache laquelle elle devait ressentir en premier.

Stupeur ? Effroi ? Culpabilité ou... Agacement injuste et immature de voir une vieille rivale réapparaître ?

La capitaine s’écarta et, dans le même mouvement, Aesira se retourna pour lui faire face.

— Merde... ! Tu te fiches de moi, Lev ? Une flèche dans l’abdomen... !

Qu’est-ce qu’elle serait devenue si sa meilleure amie avait disparu ? Si Malka n’avait pas été là ? Lev était le pilier sur lequel elle avait reconstruit sa vie. Sans elle, sans la chance qu’elle lui avait offerte en la trainant sur le Salvatore, elle serait encore en train de mendier dans les rues d’Oshaara. Aesira lui devait beaucoup, par sa présence, par son soutien sans faille, et elle le savait. Si Lev mourrait, elle survivrait sans doute. Mais cela reviendrait à lui arracher une partie de son âme, et elle n’était pas prête à revivre ça une seconde fois.

Pourtant, la brunette en face d’elle souriait. Un angle si radieux qu’il remontait jusqu’à ses prunelles. Rester muette n’était pas un problème, elle n’avait pas besoin de promettre quoi que ce soit pour ça. Mais il fallait encore assimiler les informations, et aujourd’hui, l’esprit d’Aesira peinait à suivre le rythme. Avoir croisé son frère l’avait-elle perturbé à ce point ?

— Tu...

Et elle allait se marier. Les yeux aussi ronds qu’un cul de bouteille, Sira scruta la bague au doigt de Lev. Oh, putain de merde. Elle releva la tête vers elle, accrocha son regard, et cette fois, elle ne retenu pas un seul mot des explications de sa meilleure amie. Ses doigts échappèrent aux siens, et sans crier gare, elle sauta à son cou avec perte et fracas dans un cri de joie frôlant l’ultrason.

— J’y crois pas ! Tu es... !

Ses lèvres se pincèrent, retenant de justesse le secret qu’elle devait pourtant protéger encore plus férocement que les autres, avant de reprendre en chuchotant :

— Tu es enceinte... !

Ses bras se resserrèrent autour de la jeune femme. Sa joie débordait. Qu’importe le reste, ses inquiétudes envers Malka, sa rancœur envers Aes, tout ça n’avait aucune importance pour le moment. Lev attendait un bébé !

— Je suis tellement contente pour toi...

Elle soupira contre elle, sourire aux lèvres, plus apaisée soudain. Ses yeux étaient clos, pour mieux savourer ce câlin du bonheur, et pour mieux endiguer les petits picotements sournois qui s’éveillaient au bord de ses cils.

— Donc c’était pour ça, la citronnade. Lâcheuse !

Plus émue qu’elle ne voulait bien l’admettre, Aesira attrapa ses épaules et recula d’un pas. Elle ne put s’empêcher de regarder vers le ventre encore plat dissimulé sous la belle robe de la capitaine.

— Evidemment que tu vas devoir ralentir la cadence...

Elle releva le nez, les lèvres habillées d’un sourire mutin et complice.

— ... Madame Levanah Carrery.

Après tout ce que son amie avait traversé, la famine, la disparition de sa sœur, la mort de Vikter puis la perte même momentané du Salvatore, tout semblait enfin s’aligner pour lui offrir l’existence qu’elle méritait. Et elle méritait le meilleur. Aesira ne laissera personne affirmer le contraire.

Il était difficile d’exprimer pourquoi ces nouvelles la touchaient autant. Peut-être parce que la demoiselle savait, au fond d’elle, que jamais une telle vie ne lui conviendrait. Le vivre à travers Lev sera grisant. Et surtout, cet enfant à naître restait la preuve que quelque chose de bien pouvait finalement ressortir d’une enfance miséreuse comme la leur.

Et autant se le dire, ce doigt d’honneur balancé au nez de l’univers avait une saveur unique.

Ses mains vinrent récupérer les siennes.

— Je sais que tu ne me laisseras pas derrière, je n’ai jamais douté de toi. Et sache qu’il en va de même pour moi. Aucune muraille et aucune armée ne saurait me tenir loin de toi. Avitus Carrery a intérêt a bien se tenir, tu peux me croire.

Un sourire entendu effleura ses lèvres, avant de redevenir bien plus sérieuses.

— Qu’importe où tu te trouves... Même à l’autre bout de l’océan, si tu as besoin de moi, je trouverai un moyen de te rejoindre. Je serai là.

Et sur ces mots aux allures de promesse, elle reporta à nouveau son attention sur le ventre de sa meilleure amie.

— Ça fait combien de temps... ?

@Levanah Carrery

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Jusqu'au bout du monde.

L’entente entre Malka et Aesira n’avait jamais été parfaite. Une rivalité s’était installée entre les deux femmes, toutes deux très différentes, trop pour se comprendre visiblement.. La moue renfrognée de son amie la fit sourire, elle n’en n’attendait pas moins d’elle après tant de petits secrets sagement gardés durant le trajet. Avitus souhaitait une discrétion absolue sur son état, mais Levanah n’avait pas la force de cacher la vérité à cette femme, sa moitié, son coup de coeur amical. Un binôme fort, solide et qui avait enduré bien des épreuves.

Aesira renvoyait l’image d’une femme forte et courageuse, capable de défier Kyrell où et quand il le souhaitait, Kyrell ou n’importe quel autre adversaire d’ailleurs. Forte, elle l’était. Courageuse, plus que n’importe quelle autre femme, plus qu’elle… mais elle était également brisée par une jeunesse affreuse dont elles avaient parlé de temps en temps..

Alors ce sourire.. son sourire, cette joie qui entourait son être, c’était un cadeau hors de prix. Aesira lui sauta au cou et après un petit pas pour se rééquilibrer, Lev entoura ses bras autour de sa taille, les yeux humides de larmes de bonheur. Elles en avaient fait du chemin…

« Je ne manquerai pas de le mettre en garde ! » dit-elle en riant. « Ou peut-être vais-je te laisser cette tâche, il doit te rencontrer, c’est évident. » L’homme qu’elle allait épouser avait entendu le prénom “Aesira” dans tant de récits qu’il voudrait la rencontrer. Il ne serait pas déçu du voyage !

La Capitaine dépose un baiser sur les tempes de son amie, son cœur débordait d’amour en entendant ses promesses. Bien sûr qu’elle traverserait l’océan pour lui venir en aide, elle n’en doutait pas une seule seconde et ferait de même pour elle. « Deux mois, bientôt 3 peut-être. Cela doit rester secret jusqu’au mariage, je crois qu’il s’inquiète pour ma réputation plus que pour la sienne. » Un enfant hors mariage, une fille du peuple au bras d’un héritier, ça faisait trop de règles bafouées pour pouvoir crier cette heureuse nouvelle sur tous les toits.

« Même si tu sais pertinemment que je me moque de ce que le monde peut penser de moi » Un rire franc résonna sur la Vivenef, celui d’une Capitaine soulagée de partager son bonheur devant une vue merveilleuse.

« Qu’importe ce que Kyrell marmonne, tu regarderas les couchers de soleil pour moi, n’est-ce pas ? Il est toujours grincheux celui-là. » Une façon délicate d’avouer qu’elle ne reprendra pas souvent la mer, peut-être une fois ou deux encore avant que cela devienne trop risqué pour cette petite vie en construction..

« Assez parlé de moi. Tu avais l’air songeuse à mon arrivée, tout va bien ? »
Levanah prit place à côté de son amie, les coudes en appui sur le bastingage et les yeux rivés vers l’horizon, vers cette mer qui lui manquerait inévitablement.

@Aesira Sinda

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Jusqu'au bout du monde.

Une certaine fébrilité anima le cœur de la guetteuse lorsqu’il fut question de rencontrer le prétendant de sa meilleure amie. Grommeler quelques promesses de vengeance à son encontre était une chose, faire bonne impression devant l’héritier Carrery en était une autre. Parce qu’elle allait forcément devoir faire un effort pour s’entendre avec cet homme, pas vrai ? Si Avitus était la moitié qu’avait choisi Lev, mieux valait qu’elle ne se le mette pas à dos.

Pas tant que Lev était heureuse, du moins.

— Tant que tu ne m’obliges pas à enfiler une robe qui me donne l’air ridicule...

Ce serait un calvaire. Pire ! un enfer ! Aesira était attachée au confort et à la simplicité de ses vêtements d’homme, et les rares fois où elle avait tenté d’enfiler les belles tenues raffinées de Levanah, elle s’était fait l’effet d’une greluche empotée. S’il l’avait vu habillée comme ça, nul doute que Kyrell serait encore en train d'en rire aux larmes.

Deux mois... C’était à la fois si long et si court. Bientôt, la Capitaine Stark sera mère, et plus rien ne sera vraiment pareil. Ce changement avait toutefois l’air d’une bénédiction venue du ciel, et Aesira choisit d’enterrer les inquiétudes qui commençaient déjà à poindre en elle. Elle avait hâte de rencontrer le petit être qui prenait peu à peu forme dans le ventre de sa meilleure amie.

— Dans ce cas, préservons ton fiancé, sourit-elle, complice. Je ne dirai rien. Même sous la torture. Même après cinq bouteilles de vin. Tu as ma parole.

Et leurs serments étaient sacrés.

— Je suis sûre que je peux finir par convaincre Kyrell de les regarder avec moi, ces couchers de soleil.

Reculant d’un pas, elle appuya sa hanche contre le bastingage, leva les yeux au ciel et croisa les bras. L’ancien pirate pouvait jouer les durs autant qu’il le voulait. S’il s’était présenté pour rejoindre l’équipage du Salvatore, c’était bien qu’il avait une once d’humanité et de réflexion en lui. Partant de là, son cas n’était peut-être pas totalement désespéré.

Mais surtout, il était probable qu’Aesira se rabatte un peu plus que d’ordinaire sur ce compagnon qu’elle avait appris à sincèrement apprécier. Aussi délicat soit-il, le message était pourtant clair ; Lev allait progressivement se retirer du devant de la scène et laisser un vide sur la Vivenef. Le cœur de la guetteuse se pinçait déjà d’une triste mélancolie qu’elle ne put retenir, mais qu’elle s’appliqua à ignorer.

— Moi ?

Prise de court, elle se raidit de haut en bas. Ses yeux dévièrent. Elle s’empêcha de baragouiner un « tout va très bien » qui aurait sonné complètement faux. Elle venait d’être percée à jour, mais cela était-il vraiment surprenant ? Lev était celle qui lisait le mieux en elle.

— Qu’est-ce qu’elle vaut, cette citronade ?

Elle attrapa et pris une rasade au goulot de la bouteille comme s’il s’agissait d’un alcool fort capable de lui donner un semblant de courage. Une grimace déforma ses traits lorsqu’elle redescendit le bras. Il allait falloir se résigner. Cette boisson, en plus d’être trop fade pour ses papilles, ne l’aiderait en rien.

— J’ai... J'ai vu un fantôme l’autre jour...

En parler la rendait nerveuse. Les souvenirs qui tournaient en boucle dans sa tête n’en devenaient que plus réels. Mais elle savait aussi qu’elle finira par exploser à garder cette histoire pour elle trop longtemps. En mettant des mots sur tout ça, peut-être qu’elle parviendra à y voir plus clair.

Faisant face à la mer à son tour, elle posa ses paumes contre la rambarde de bois et pris une longue inspiration iodée. Les derniers rayons du soleil caressèrent ses paupières closes, lui administrant le doux réconfort dont elle s’imprégnait avant l’arrivée de Lev.

— Mon frère m’a retrouvée, murmura-t-elle, loin de son habituel hargne impétueuse. Aesira se sentait redevenir cette petite fille perdue et sans défense. C’était terrifiant. D’après ce qu’il dit, il n’a jamais cessé de me chercher...

Un rictus sardonique tira ses lèvres. Encore un mensonge, pas vrai ?

@Levanah Carrery

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Jusqu'au bout du monde.

Levanah Stark avait appris à ne faire confiance à personne dans ce monde. Trop souvent moquée, trop souvent déçue, elle préférait ne compter que sur elle-même.. et sur la jolie brune à sa droite. Aesira était son amie depuis tant d’années. Elle avait rit aux éclats à ses côtés, enquillé un nombre incalculable de bouteilles de vin au point de faire des pitreries sur le pont jusqu’à tard dans la nuit, elles s’étaient battues ensemble pour repousser des attaques récurrentes et enfin, la jolie Sinda l’avait si souvent rejoint la nuit lorsqu’elle l’entendait gémir dans ses cauchemars. A présent, un homme se dévouait pour tout cela, le bon et le moins bon de sa personnalité..mais ça n’effaçait rien, cet amour indéfectible envers sa soeur de coeur était intacte et le resterait.

« Tu es pourtant ravissante en robe » s'esclaffa-t-elle en se souvenant de ses quelques tentatives de relooking. De jolies robes pouvaient mener bien des hommes à la baguette, mais Aesira n’avait pas besoin de ça, elle préférait les rappeler à l'ordre à la manière d’une lionne.

L’euphorie se dissipa lentement, cédant sa place à une atmosphère plus lourde et emprunte de tourments. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait plus apperçu cette expression figée sur les traits de la jolie brune.. Son coeur manqua un battement sous l’effet de la culpabilité. Avait-elle été trop absente ? Depuis quand se sentait-elle mal ? Levanah la regarda sans détour, à son service pour écouter ou garder le silence près d’elle. Jamais elle n’avait insisté pour entendre les maux de ses matelots, elle préférait qu’ils viennent d’eux même à sa rencontre.

« Si tu veux du vin, il y a pleins de bouteilles dans ma cabine..» murmura t-elle en accrochant son âme à la sienne au travers de doux regards pour l’inciter à se libérer, à se confier.

Son frère..

La capitaine ressemblait plus à un poisson chat attrapé par surprise qu’à une élégante future épouse. Ses yeux vairons étaient ronds comme des billes, pleins d’incompréhensions. Dans tous les détails qu’elle connaissait de la vie de son amie, elle n’avait même pas souvenir qu’elle ait mentionné un frère.

« Je.. ne savais pas que tu avais un frère, Aesira. »

Sa voix était douce, comme une délicate caresse pour calmer la tempête qui agitait le regard de sa guetteuse. Elle connaissait ce discours.. Malka lui avait servi le même, à quelques détails près et lorsqu’elle s’était confrontée à elle la première fois après 10 ans, l’Archipel avait manqué de peu de connaître la puissance d’une shaman en colère. Le ciel s’était gorgée de noir, près à se deverser sur Oshaara comme un mur d’eau devastateur. Aesira était tourmentée, mais elle ne s’emportait pas.

« Je vois..
Et.. Qu'en penses-tu ? Je.. Pourquoi étiez-vous séparé tout ce temps ? » La raison avait plutôt intérêt d’être bonne car la Capitaine était bien capable d’aller lui arracher les yeux en personne à ce mystérieux frère !

« Vas-tu le revoir ? »

@Aesira Sinda

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Jusqu'au bout du monde.

L’idée d’aller chercher une bouteille de vin dans la cabine de sa capitaine était tentante, mais elle n’était pas sûre d’être capable de reprendre cette conversation après avoir fait l’aller-retour. Oh, ce qu’elle en voulait à Aes ! Elle aurait dû rayonner de joie et de soulagement pour Lev, pour la savoir saine et sauve et en route vers un avenir radieux. A la place, il fallait que son frère assombrisse le tableau.

Sira tortura sa lèvre entre ses dents et finit par se détourner du coucher de soleil pour lui préférer le visage surpris de sa meilleure amie. Devait-elle se sentir coupable de ne pas lui avoir parlé de lui ? Même si son absence avait laissé un gouffre béant dans son cœur, il appartenait à une partie de sa vie qui n’avait plus d’importance.

— Eh bien... Jusqu’à présent, j’avais réussi à oublier que j’en avais un.

Elle déglutit pour chasser le nœud qui s’était formé au creux de sa gorge. C’était idiot. Ce pan de sa vie était loin, très loin maintenant. Pourquoi fallait-il qu’elle se triture l’esprit ainsi ? Ça réveillait des souvenirs qu’elle évitait pourtant avec soin.

Malgré elle, un sourire sardonique étira ses joues. Elle lâcha le bastingage pour mieux se hisser dessus, les jambes dans le vide. Parler d’Aes la mettait à cran, mais elle n’avait pas envie de cacher la vérité à Levanah.

— C’est... Ce n’était pas sa faute. Enfin, je suppose.

D’une longue inspiration, elle tenta de garder une analyse objective de la situation. Quand ils avaient été séparés, ils n’avaient que six ou sept ans. Aes n’avait aucun pouvoir de décision à cette époque. Il serait injuste de le blâmer pour l’abandon dont elle avait fait l’objet.

— Quand j’étais gamine, un jour, mon père m’a laissée chez les Lengsar. Il n’était pas question qu’il revienne me chercher, ni quoi que ce soit d’autre. Il m’a juste déposée là et il s’en est allé sans se retourner.

Une brise chargée d’iode agita ses longs cheveux foncés. Aesira leva le nez pour se galvaniser de cette fraicheur vivifiante.

— Il a écopé d’une jolie petite somme en échange, sans doute pour payer une partie de ses dettes. Les Lengsar me l’ont souvent répété, pour que j’ai bien conscience de la somme dont je devais m’acquitter.

Finalement, elle soupira.

— Et pendant toutes les années qui ont suivi, Aes a vécu sous la protection de mes parents, choyé comme un précieux poupon, juste parce que c’était lui, l’héritier attendu.

Le sournois sentiment d’injustice qui se disséminait en elle lui retournait l’estomac. Tout compte fait, elle se félicitait d’avoir préféré la citronnade à l’alcool. Qu’elle se mette à rendre ses tripes par-dessus la rambarde aurait rendu la scène encore plus pitoyable.

— A l’écouter, murmura-t-elle, animée d’un calme qui dissimulait pourtant une tempête de fureur et de détresse, il n’a jamais cessé de me chercher. Il n’a jamais su ce qui m’était arrivé. Tu imagines ? Trente ans... Trente ans, et ce n’était pas suffisant pour me retrouver sur l’une de ces putains d’îles, jusqu’à ce qu’on se croise par hasard.

Un rire acerbe agita ses épaules, avant qu’elle ne siffle :

— C’est des conneries.

Elle pinça les lèvres et arrima ses prunelles aux yeux verrons en face d’elle.

— Je n’ai pas ta force, Lev... Tu as réussi à mettre tes différends avec Malka de côté, moi, je ne pense pas en être capable. Alors, non, j’espère ne jamais le revoir. Et si c’est quand même le cas... J’espère que cette fois, j’aurais le courage de lui planter mon épée dans le ventre.

@Levanah Carrery

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Jusqu'au bout du monde.

Levanah resta d’abord silencieuse, écouter était de loin la meilleure chose qu’elle pouvait faire pour aider son amie à se libérer de son fardeau. La jolie brune grimpa par-dessus le bastingage et la Capitaine l’imita sans mal. Les deux amies s’étaient reconstruites à bord de ce navire, il était devenu leur maison, leur famille, et voilà que 15 ans plus tard, les liens du sang faisaient de nouveau surface dans leurs vies.. pourquoi maintenant, pourquoi, tout simplement ?

« Vous étiez jeunes… » répéta t-elle avec prudence pour confirmer qu’en effet, un garçon de sept ans ne pouvait pas avoir le pouvoir de décision, ni d’action.

Levanah s’empara de la main de sa meilleure amie, mêlant ses doigts aux siens comme elle le faisait pour elle les nuits de cauchemar.

« Tu as tellement changé Aesira… Je ne saurais pas reconnaitre la femme que j’ai rencontré à celle que tu es devenue… Cette vie ne nous était pas destinée, regarde nous.. Nous étions pauvres et nous naviguons désormais sur une Vivenef. La réputation de notre commerce ne cesse de grandir… Et si… il n’avait pas cherché au bon endroit ?»

Les souvenirs qu’il avait d’elle étaient si anciens…

« Je ne lui donne pas raison et je t’invite à la prudence. Toi non plus tu ne sais pas ce qu’il est devenu.. tout comme je continuerai de me méfier de Malka. »

Elle soupira, profondément affectée par la détresse de son alliée de toujours.

« Est-ce vraiment lui qu’il faut tuer Aesira.. ? J’ai longtemps pensé que tu viendrais un jour me chercher pour te venger des Lengsar.. ou de tes parents…
Enfin.. Je doute qu’achever ton frère t’aidera à te décharger de tes fardeaux.. Accorde toi du temps pour digérer tout ça… Tu as une famille à présent, un peu bancale, je te l’accorde » dit-elle en regardant Kyrell et Erdem gesticuler dans tous les sens.

« Ils ont encore lancé un débat sur lequel il ne seront jamais d’accord » Un rire léger lui échappa tant elle aimait cette vision. Le noyau dur du Salvatore était soudé, et les nombreux voyageurs de passage ajoutaient de la vie.

« Ton frère, que fait-il désormais ? »

@Aesira Sinda

(c) DΛNDELION

Jusqu'au bout du monde.

Ballotée par des émotions trop anciennes pour ne pas être devenues fétides, la guetteuse se raccrocha à la main de sa meilleure amie comme à une ancre. Levanah la ramenait à l’instant présent par ce simple geste et lui rappelait qu’elle n’était plus cette gamine esseulée. Aujourd’hui, elle était entourée d'autrefois. Elle était aimée et faisait partie d’une famille qu’elle avait choisie. Elle était forte. La jolie brune avait raison. Cette vie, elle n’avait pas été écrite pour elles, et pourtant... !

Alors peut-être qu’Aes n’était pas si fautif que ça.

Elle frémit. Quelque part au fond d’elle, elle avait conscience d’être dure et certainement un peu injuste. Mais elle ne se sentait pas prête à libérer la vieille rancœur qui lui brûlait le cœur. Sa présence était devenue bien trop familière pour qu’elle ne laisse pas un gouffre effrayant, si un jour elle venait à disparaître.

— Malka... Tu penses qu’elle pourrait encore te causer du tort ?

C’était mesquin, mais la méfiance de Lev envers sa sœur la réconfortait un peu. Elle n’était pas emballée à l’idée de savoir Malka de retour dans le paysage, c’était peu de le dire. Alors, apprendre que sa meilleure amie gardait avec elle une certaine distance de sécurité... C’était satisfaisant, pour ses sentiments purement égoïstes.

— Je... Je sais... J’ai longtemps cru aussi que je te le demanderais...

Ses lèvres se pincèrent. Poser des mots sur ce qui se passait en elle n’avait jamais été un exercice évident.

— Mais je crois que je n’ai aucune envie de me retrouver en face d’eux à nouveau...

Ce qui était dramatique dans un sens. Pendant toutes ces années, les Lengsar avaient continué leur petit marché immonde. Combien d’autres enfants s’étaient vus briser en passant entre leurs mains ? En laissant faire, est-ce qu’Aesira se rendait complice de leurs immondices ?

Elle chassa ses pensées sans queue ni tête. A la place, ses doigts serrèrent la main de Levanah. Elle se tourna vers elle pour retrouver son regard.

— Mon présent et mon avenir sont ici... Sur ce bateau. J’ai tout ce que je peux espérer. J’ai un toit sur la tête tous les soirs, j’ai de quoi manger à chaque repas, je t’ai toi et, aussi étonnant que ça puisse être, j’ai aussi ces deux grands crétins là-bas, sourit-elle en désignant les deux hommes qui tiraient justement un rire à leur capitaine. Alors pourquoi... Pourquoi aller déterrer ce qui appartient à un passé que je préfère oublier ?

Son sourire s’envola dans la brise marine.

— Je ne sais pas ce qu’il fait, je suis partie avant de lui laisser le temps de me raconter quoi que ce soit. Tu as sans doute raison, je n’ai sans doute aucun intérêt à le tuer... C’est juste... juste que je ne veux pas lui faire de place dans ma vie. J’avais peut-être besoin de lui avant... mais ce n’est plus le cas maintenant.

Ses traits devinrent plus durs.

— Et je refuse de le laisser bousculer l’équilibre que j’ai reconstruit.

Lentement, elle prit une grande inspiration. Dévoiler ce qu’elle avait sur le cœur n’était pas une partie de plaisir, pour autant ça l’aidait plus efficacement que le coucher de soleil à mettre de l’ordre dans sa tête. Tout compte fait, Aesira greffa un sourire plus léger sur son minois.

— Bon, et alors... Quand aura lieu ce mariage ?

@Levanah Carrery

(c) DΛNDELION

Jusqu'au bout du monde.

[i]Levanah & Aesira.

Malka, Malka, Malka..

Levanah ne put s’empêcher de sourire. Si son amie attendait d’elle des conseils sur comment gérer les relations familiales, elle s’adressait à la mauvaise personne. Écouter, c’était dans ses cordes, pour le reste, les deux jeunes femmes avaient grandi dans des schémas de vie assez similaires, privées de la véritable notion de “famille” depuis toujours et ne pouvaient qu’essayer de nager dans une eau trouble…

« Tu connais ma soeur..
Elle est.. imprévisible. »

Des qualités, Malka en avait de nombreuses et la cadette Sarao se souvenait très bien de tous les sacrifices qu’elle avait fait pour elle. De là à parler de confiance.. c’était impossible.

« Pour se débarrasser de ses démons, il faut parfois les affronter.. Enfin, nous sommes à bord de ce navire depuis des années. J’espère que tu sais que tu n’as qu’un mot à dire pour que je sois à tes côtés. Pour défier les Lengsar ou.. pour tout. Absolument tout. » Une amitié indéfectible, bâtie sur un socle de drames et de tristesse, mais devenue ô combien merveilleuse au fil du temps.

« C’est toi ma famille, Aesira. Les liens du sang n’offrent pas le pardon absolu, ni même l’amour. C’est à toi de décider ce que tu souhaites faire avec ton frère, mais puisque tu es ma sœur de coeur, sache que je serai ravie de lui botter les fesses s’il se comporte mal. Deux pour le prix d’une, le plus à plaindre, je crois que c’est lui ! » Un léger rire s’échappa de ses lèvres et Levanah pivota pour déposer un baiser délicat sur la joue de son alliée.

« Un mariage.. tu te rends compte. Avec l’héritier de Temerys, bon sang ! Tu sais combien de femmes lui tournent autour !? Je n’arrive pas encore à croire ce qu’il m’arrive.. pourquoi.. pourquoi moi !? … Alors.. ce mariage.. »

Sous le regard bienveillant des matelots à bord, souvent idiots, mais également protecteurs, Levanah se lança dans le récit des dernières semaines de sa vie sans omettre le moindre détail, y compris les plus croustillants et privés pour discuter et refaire le monde jusqu’à tard dans la nuit…

@Aesira Sinda

(c) DΛNDELION