need somebody, help!

Dim 24 Mar 2024 - 14:17

Kalyani & Aedan

La lune dévorait les rivages de Feyr tandis que les âmes s’égrainaient dans le port, affluaient dans les tavernes, célébraient le solstice d’automne. Une nuit plutôt fraîche, le brouillard particulièrement mordant empêchait de voir à 5 mètres. Les corps semblaient s’extirper du néant dans les rues de Terrilya. Aédan s’était joint à ce qui devait être un joyeux rassemblement, mais il n’avait pas du tout la tête à ça. Le sourire forcé placardé sur le visage, le Feyrborn affichait une simple façade peu encline à faire la fête. Mais c’était traditionnel ici sur Feyr de se réunir pour le soir de Samhain. Une fête que sa mère appréciait, sa mère qui lui manquait tant… L’homme ne s’était jamais vraiment remis de sa mort. Son âme en peine errait, il se déplaçait comme un spectre, la joie de vivre avait quitté depuis longtemps ses traits.

Emmené par quelques connaissances, des hommes avec qui il avait eu la chance de naviguer à bord du Wyvern, Aédan avait enchaîné quelques bières, quelques chants traditionnels, quelques plats généreux qui remplissaient bien la panse. Sur une île de charpentiers navals il fallait bien cela pour endurer de pénibles journées de travail. Lorsqu’un de ses marins commença a évoqué le passé, entre deux chopes de bières, Aédan commença à se tendre. C’était encore beaucoup trop tôt pour lui de parler de sa mère, d’entendre parler d’elle… Rien que l’évocation de son nom lui donnait l’envie de se dévorer la langue pour s’empêcher de vriller. Mais l’alcool faisant plutôt mauvais ménage avec la tristesse et la mélancolie, Aédan tapa du poing sur la table.

Les autres comprirent. Il suffisait d’un geste ou d’un regard de leur jeune capitaine pour comprendre qu’ils en avaient déjà beaucoup trop dit. Alors le Feyrborn se tira de son tabouret sans un mot et salua la compagnie dans un demi-sourire. Qu’ils veuillent évoquer le passé, grand bien leur fasse. Mais lui se refusait à tourner le couteau dans la plaie. Il préféra simplement se retirer avant de perdre ses moyens. C’est en tout ce qu’il se dit, mais sous le coup de l’alcool et de la mélancolie, Aédan devenait rapidement un homme très instable. Il quitta alors la taverne, se couvrant d’une épaisse veste avant de fondre dans la brume. Après de longues minutes de marche, il rejoignit dans un coin un peu sombre de la ville, une autre taverne. Là, personne ne reconnaîtrait son visage, ce n’était pas un endroit qu’il avait l’habitude de fréquenter. C’était du moins ce qu’il se disait… Naïf. Mais sa gueule ne passait pas inaperçue.

Lorsqu’il traina sa carcasse à une table, voulant se faire discret, quelques visages inconnus se tournèrent vers lui. Mais rien qui ne puisse l’inquiéter, les Feyriens étaient des gens curieux, méfiants… Inconsciemment le Feyrborn ne choisit pas l’endroit pour rien, aux locaux se mélangeaient quelques âmes étrangères, des pirates probablement. Ca riait autant que ça buvait. Il en fit de même au fond discrètement, silencieusement, jusqu’à ce qu’un abruti s’assit à sa table. Aédan releva un regard, mutique.

« T’es Aédan Feyrborn toi ? J’te r’connais ! »

« Mh… » se contenta de répondre le marin, les yeux fixés, plantés sur la silhouette du gars.

« On raconte des choses sur toi au sud… »

Aédan se contenta de boire une gorgée de sa chope en guise de réponse. Il n'en avait proprement rien à foutre de ce qu’on racontait sur lui dans les mers du sud.

Le mec poursuivit : « Le nouveau capitaine du Wyvern… »

Le Feyrborn commença à se tendre, la mâchoire se bloqua, la colonne se raidit. Il but une nouvelle gorgée de sa bière.

« Les pirates ont encore donné une bonne leçon à la guilde ! » et le gars se mit à glousser, un rire tonitruant qui en appela d’autres… Trois quatre types le rejoignirent, attirés par l’échange, par le bruit… par le silence assourdissant de Aédan qui semblait simplement se laisser faire.

« Racont’nous ils s’y sont pris comment ? Pour mettre fin à ses jours… ? »

Ni une ni deux, l’homme se leva et foutu un grand coup de chope dans la gueule du mec qui tomba de sa chaise, le nez en sang. Il n’en fallut pas plus à ses acolytes pour attraper Aédan et l’emmener hors de la taverne pour lui régler son compte… Le Feyrborn fulminait, tentait de se débattre, mais à quatre contre un, le combat était quasiment perdu d’avance…

@Kalyani Sìnda

(c) DΛNDELION

Dim 24 Mar 2024 - 23:50

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Aédan & Kalyani

Quelques semaines avant leur recrutement sur l'Écho

Presque un mois à terre depuis leur dernier débarquement et toujours aucune perspective. Avec un regard morne aux quelques pièces qui s’entassent au fond de sa bourse, Kalyani se dit que si elle ne gagne pas de l’argent rapidement, elle et Wyl vont être bonnes pour s’embarquer pour un chalutier, histoire de gagner de quoi vivre. Elles l’ont déjà fait. Pas qu’elles apprécient particulièrement mais quand il faut bosser… Sa petite sœur peut encore se produire dans les tavernes du coin. Cuisiner, pousser la chansonnette pour des ivrognes pas trop regardant sur la justesse des notes… Gagner de quoi vivre. Non en vrai le problème c’est que Kaly s’ennuie. Quand elle est à terre, elle trouve toujours un projet intéressant à réaliser pour un client intéressant ou un autre. Mais là… Feyr brille par son absence de perspectives.

La jeune femme est assise dans le coin d’une taverne du port à regarder les matelots s’enivrer et échanger des anecdotes toutes plus invraisemblables les unes que les autres. Elle finit un verre de vin chaud, à l’abri du brouillard qui glace ses os d’oshaarienne, largement ignorée par les autres clients. Elle sait qu’elle n’attire pas l’attention. Ses traits étrangers lui ont peut-être valu un coup d’œil appuyé ou deux mais son attitude la proclame comme l’un d’entre eux. Le couteau à sa ceinture aussi doit calmer les plus enflammées des imaginations. On la laisse tranquille donc. Une courtoisie qu’on n’étend pas à un autre inconnu quand il rentre.

À sa mine, Kalyani devine qu’il est venu là pour anesthésier à grands coups d’alcool ce qui le ronge. À son physique, elle reconnaît un natif de l’île. À sa démarche, elle sait que lui aussi navigue. Mais c’est à ses vêtements qu’elle identifie sa naissance. Si les autres sont comme elle nés dans la fange, le nouveau venu lui a le sang bleu. Et son apparition déclenche une certaine agitation chez une bande de marins qu’elle a repéré en entrant. Ceux qui l’ont dévisagée plus longtemps que les autres avant de juger sans doute qu’elle ne valait pas les ennuis qu’ils s’attireraient en la lutinant dans l’espoir d’un contact avec une femme.

L’un d’entre eux se lève et va s’asseoir à côté de l’inconnu, l’interpellant bruyamment. Un Feyrborn… Rien que ça. Et capitaine comme elle l’a deviné. Avec une attention de requin qui capté le goût du sang, Kalyani regarde l’interaction en se demandant qui du noble ou du marin va porter le premier coup. L’atmosphère de la taverne change. De la soirée sans histoire, portée par son flot de vantardise bon enfant, l’ambiance devient glauque, malsaine. Certains piquent du nez dans leur choppe, refusant d’être associés à ce qui va suivre. D’autres attendent avec un sourire ravi que le premier coup soit porté…

Et puis le premier coup. Le signal de la curée. Alors que le fouille-merde bascule, ses acolytes se lèvent pour fondre sur leur proie. Tout ça n’était donc qu’une embuscade. Kalyani soupire en les regardant entraîner le capitaine à l’extérieur et repense à sa bourse trop plate. Un noble reconnaissant est un noble qui paie. Souvent. Et si elle ne veut pas se retrouver à écailler du poisson sur une barcasse moisie, l’artilleuse doit prendre quelques risques.

Repoussant son tabouret au loin, elle traverse la salle avec un regard de défi pour les soûlards. Personne ne songe à l’intercepter et elle sort dans l’air froid du soir pour se retrouver cueillie par les sons très clairs d’un passage à tabac. Honteux… Révoltant… Deux hommes qui se tapent dessus avec leurs poings dans une taverne c’est une soirée animée. Quatre qui tombent sur un marin seul, c’est un problème. Elle tourne le coin de rue en dégainant son pistolet, alignant le premier de la bande. « Hey… Il a eu son compte. Foutez-lui la paix. »

L’homme se retourne pour voir la gueule de l’arme alignée avec son visage et même dans la pénombre nocturne, Kalyani voit la panique se peindre sur ses traits. Elle sait qu’il ne peut manquer la façon dont elle tient son bras, déjà prête à compenser le recul du coup quand il partira. Elle n’est pas surprise de le voir prendre ses jambes à son coup. « Plus que trois… » commente-t-elle en espérant que le noble saura saisir l’opportunité qu’elle lui offre en distrayant ses agresseurs.

(c) DΛNDELION

Jeu 28 Mar 2024 - 11:15

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Kalyani & Aedan

Aédan se croyait discret, presque intouchable. Il s’imaginait pouvoir noyer son chagrin dans un coin de la taverne sans personne pour l’emmerder. C’est sans compter sur deux trois téméraires qui réclamaient de l’animation de la baston… De se faire un petit noble de Feyr, ils n’avaient à perdre. Pas d'attaches, pas de représailles. Les Feyrborn était une famille puissante dans l’archipel, un pouvoir pas toujours apprécié par ici. Les pirates du moins, ceux qui ne sont pas natifs de l’île. Alors non le nouveau capitaine du Wyvern était tout sauf intouchable. Et ils n’hésitèrent pas. Après une ultime provocation, Aédan explosa le nez de l’un d’eux à coup de chop de bière encore à moitié remplie. Les quatre pirates l’empoignèrent et l’emmenèrent à l’extérieur de la taverne pour lui régler son compte… à la déloyale.

Les coups fusent : dans les côtes à plusieurs reprises, dans l’arcade sourcilière, dans le menton. Aédan crache du sang, il se débattait mais quand on est tenu par deux deux types tandis que les deux autres cognent, il est bien difficile de se défendre à armes égales. Très vite dans la brume une voix féminine se fit entendre. L’un des types relâcha son bras et partit en courant, alors que la voix réclamait à ce qu’on foute la paix au Feyrborn. Un autre cessa donc de mettre des coups à Aédan qui interloqué releva son regard sur la jeune femme prêt à lui sauter à la gorge. Aédan profita de ce moment de flottement pour se dégager et se jeter sur l’un des gars lui fracassant la tête au sol. Le marin faisait son poids et, poussé par l'adrénaline, il ne laissa que peu de chances au gringalet qui ne s'était contenté que de lui donner des coups. L’avantage changea de camp. L’autre qui lui tenait le bras tenta à son tour de se jeter sur lui, les chicos déjà éclatés dans la bouche, il n’avait visiblement plus rien à perdre. Aédan se massa la mâchoire en attendant de le voir arriver. Il tenait à peine sur ses jambes, il voyait quasiment flou, mais il était hors de question de se laisser faire. Il ne vit cependant pas la lame du type qui se jeta littéralement sur lui.

Le Feyrborn bascula en arrière empêchant le gars de lui planter sa lame dans le thorax. Les muscles contractés, les dents serrées, il repoussait de toutes ses forces le couteau qui menaçait son joli visage déjà bien amoché. Au bout de plusieurs longues secondes le type se prit un vilain coup de crosse dans le crâne et tomba sur lui. Aédan le repoussa avant de se relever avec toute la difficulté du monde. Il passa une main dans sa chevelure et essaya tant bien que mal de reconnecter tous ses neurones.

« Putain de pirates… » éructa-t-il, les pas instables, l’esprit désorienté. La gueule en sang, les côtes particulièrement douloureuses, les inspirations se firent tout aussi douloureuses.

Il distinguait une silhouette élancée, s'avançant à pas de loup vers lui, cette voix qui s’était élevée dans la brume… Sa sauveuse en somme. « Merci… » Sans elle, le pauvre homme serait probablement au sol entre la vie et la mort. Il oubliait parfois que ce monde pouvait être très cruel, mais ici à Feyr, son île natale. « J’crois que j’vous en dois une belle… » dit-il tentant presque de faire de l’humour. Il cracha du sang par terre. Il n’était pas impossible qu’il ait une côte fêlée.

@Kalyani Sìnda

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Aédan & Kalyani

La bagarre tourne à l’empoignade comme le capitaine saisit l’opportunité de se libérer et de se venger de ses tourmenteurs. Kalyani sait que tirer dans le dédale étroit des rues de Feyr risque bien de se terminer avec un mort et pas le bon, elle se contente donc de ses poings et de la crosse de son pistolet. Pas la peine de finir en cellule pour une histoire de meurtre sur ivrogne. Leurs adversaires ne sont pas de grands combattants. Ils comptent juste sur l’avantage du nombre pour submerger leurs victimes. Mais quand l’un d’entre eux, plus féroce ou plus déterminé que les autres, elle ne sait pas, sort une arme dans l’intention expresse de seriner le Feyrborn, la jeune femme n’hésite pas, se jetant à la rescousse du noble en lui assénant à son adversaire un coup sur la tête. Et puis aussi vite que l’altercation a commencé, elle s’achève.

Kalyani entend le bruit de fuites précipitées, de grognements et de jurons puis il n’y a plus qu’elle et l’homme qu’elle vient de secourir. Et qui à première vue n’a pas l’air bien sûr sur ses jambes. Mais après une telle volée qui le serait. Elle l’entend conspuer la bande de malfrats qui l’a agressé puis la remercier. Bien… au moins a-t-il le sens de la reconnaissance. C’est toujours un pari avec les nobles. Une fois sur deux, ils vous traitent comme des valets de pied. Quelqu’un de moins subtil que Kalyani embrayerait peut-être sur une demande de récompense mais la jeune femme sait que la perspective d’un profit à court terme aveugle souvent les empressés. « De rien. J’allais pas vous laisser vous faire assassiner sans rien faire. » Elle ne laisse pas apercevoir qu’elle l’a identifié comme un noble. En fait, elle force même un peu sur son accent oshaarien, se rappelant les conseils de sa mère pour naviguer dans le vaste monde.

Elle l’examine et voit que malgré de belles plaies et bosses, il ne semble pas à l’article de la mort mais pour s’être déjà retrouvée dans le même état, elle sait qu’il va déguster le lendemain matin. Elle choisit ses mots avec précaution pour épargner l’égo peut-être délicat de son interlocuteur. « Ça va aller ? Est-ce que vous voulez voir un guérisseur ? Ils ne vous ont pas loupé… » Elle se rapproche maintenant que les choses se sont un peu calmées, histoire d’être à portée de bras s’il tangue un peu trop. Juste pour éviter qu’il aille piquer une tête dans la boue peu engageante de l’allée. « Kalyani Sínda. À votre service. » C’est le bon moment de se présenter. Après s’être enquise de son état. Elle ne veut pas paraître trop pressée. Et puis sincèrement, elle ne lui veut pas de mal. Elle a juste saisi une opportunité facile d’assurer sa situation et celle de sa sœur.

Elle regarde alentour, préférant ne pas s’attarder bien plus longtemps. « Dites, ça vous dirait pas qu’on bouge… Je doute que vos amis soient tentés de revenir mais ça se pourrait bien que d’autres se sentent pousser des ailes. » Ils pourront parler dans la sécurité relative de la taverne mais une allée glauque est le dernier endroit où converser après une bagarre. Ces ruelles sont comme l’océan en un sens et y laisser une goutte de sang revient à attirer les requins. Elle continue. « Je vous offre un verre… » Parfois, pour récupérer un peu d’argent il faut savoir investir se dit-elle en pensant à sa bourse plate et aux quelques piécettes qui y tintent.

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Kalyani & Aedan

Les salauds ne l’avaient pas ratés. La gueule enfarinée, il essayait de détailler les trains de sa sauveuse. Mais l’arcade alourdie d’une belle entaille, et l’effet de l’alcool se faisant ressentir, Aédan ne voyait plus très clair. Dans la nuit, les corps seulement éclairés par la lune, les deux silhouettes se jaugeaient. La jeune femme fort avenante s’approche, l’observa un instant le visage grimaçant.

« Je fais peur à voir c’est ça ? » Non clairement ils ne l’avaient pas loupé. Il sourit, d’un rictus à peine forcé, juste un peu blasé. Il ne pensait même pas à se venger, il pourrait mais il n’en avait pas envie. L’air hagard, un peu perdu, il ne savait pas vraiment ce qu’il voulait, là tout de suite. Peut-être dormir… ou bien reprendre un verre ? La jeune femme lui proposa éventuellement d’aller voir un guérisseur. « Non merci ça ira… » Les services d’un shaman ? Très peu pour lui, il avait encore cette foutu fierté de se débrouiller tout seul et de ne recourir à aucune espèce de magie.

« Enchanté Kalyani… je m’appelle Aédan. » Elle n'avait probablement pas manqué d’entendre qu’il portait le nom de Feyrborn. Mais il n’avait guère l’envie de se pavaner à ce propos… Son prénom suffirait. Il essaya de se souvenir pourquoi le nom Sinda lui disait quelque chose. L’alcool lui brouillait encore l’esprit, bien dommage que les quelques coups prit dans la tronche ne lui aient pas encore permis de désaouler.

La jeune femme proposa promptement de déguerpir avant que d’autres types viennent en représailles. Pas bête, même si ce soir l’homme avait le chic pour s’attirer des ennuis. « Allons y… » La jeune femme lui offrit un verre, ce qui tira un rictus de ses lèvres pincées. « Je crois que je suis celui qui vous en doit un… » Après tout c’était elle qui l’avait sorti de ce merdier sans nom. Il lui devait au moins ça.

Kalyani et Aédan s’engouffrèrent dans la ville, passant quelques allées pavées pour atterrir dans une autre taverne beaucoup plus tranquille que la précédente. Le patron le reconnut d’ailleurs, dans le coin il ne passa définitivement pas inaperçu. Le Feyrborn le salua et s’installa à une table dans un coin de la salle. Il y avait un peu de monde, mais l’endroit était moins malfamé. « Sinda… vous êtes d’Oshaara ? » D’un coup cela lui revint comme un boomerang dans la gueule. Les orphelins oshaariens portaient ce nom, c’était pour cela qu’il le connaissait !

Le tavernier leur fit parvenir deux chopes de bière. Sa bonhomie s’effaça lorsqu’il détailla le visage éraflé d’Aédan. « Ben alors qu’est-ce qui vous est arrivé ? » s’enquit-il. « Ce n’est rien… » le rassura le marin qui n’avait absolument pas l’envie de déblatérer sur la situation et d’attirer l’attention. « C’est pour la maison ! » lui offrit gentiment le tavernier qui n’insista pas et retourna à ses occupations.

« Qu’est-ce qui vous amène dans ce coin du monde, Kalyani ? » demanda Aédan tandis qu’il trinqua avec elle avant d’avaler une bonne gorgée de liquide.

@Kalyani Sìnda

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Aédan & Kalyani

L’homme n’est pas bégueule, Kalyani lui donne au moins ça. Elle en a vu des capitaines, nobles ou pas qui prennent de haut le moindre passant au motif que, eux, ont un équipage et que chacun devrait le savoir. Aedan puisque c’est son nom et qu’il le lui donne après avoir demandé s’il ne faisait pas peur à voir. « Pas plus que tous les marins du monde après s’être fait embusquer par une bande de ruffians », lui répond-t-elle, après qu’il ait refusé de voir un guérisseur. « Je me doute que vous avez l’habitude des plaies et des bosses, mais faites quand même gaffe, un doigt ou un orteil cassé qui s’infecte, ça pardonne pas. » Elle en a connu d’autres des gros durs qui voulaient éviter les guérisseurs finir avec une jambe de bois pour cause de complication.

Quand il évoque le fait de lui en devoir un, la jeune femme ne voit pas l’intérêt de protester. « Je vais pas refuser. » Et comme il s’installe à une table à l’écart, la question sur ses origines surgit. Elle hoche la tête. « Née et élevée à Anhae. Je suis une des enfants de la Maison Rouge. » Puis elle ajoute avec un grand sourire. « Nous autres bâtards, on forme une grande famille. » Le bordel dans lequel travaille sa mère – pour pas bien longtemps encore, même les prostituées doivent bien s’arrêter un jour, et l’un de ses frères ou sœurs à elle prendront le relais – a une bonne réputation. Il y a des chances qu’Aédan le connaisse, voire y soit passé. Et elle n’a jamais eu honte d’être une des gamines que la maison de passe produit parce que les contraceptifs ne marchent pas toujours.

Après que le tavernier les ait servis à l’œil et que l’homme en face d’elle l’ait invitée à trinquer, il lui demande ce qu’elle peut bien faire là. « Ce qu'on fait tous quand on a du quitter notre dernier contrat un peu vite. J’essaie de trouver une nouvelle place pour ma sœur et moi et hélas ce ne sont pas les options qui courent les rues. » Elle ne cherche pas à lui mentir. Avant d'être capitaine, il a du connaître la lente montée des échelons et les divers retours de fortune qui vont avec. Elle est honnête, au moins pour ça. Et puis les habitants de l’île de Feyr n’ont pas usurpé leur réputation de méfiance, alors autant ne pas jouer avec le feu. Avec leur physique oshaarien ni elle, ni Wyl ne passent vraiment inaperçues et les portes se sont fermées les unes après les autres. « Les bateaux sur lesquels je voudrais postuler n’ont pas de place de libre et ceux qui en ont… Vu le calibre de vos potes dehors, je refuse de naviguer dessus. » Elle repousse une mèche qui s’est échappé de sa queue de cheval avant de boire une gorgée de la piquette locale, laissant la brûlure de l’alcool tracer une ligne de feu dans son œsophage en regrettant les spiritueux plus délicats de la Maison Rouge. Réduite à siroter de la piquette à marin dans un bouge à l’antipode en se gelant les fesses sur ce bout de rocher pleins de paranoïaques. « Feyr était pas mon premier choix d’escale. Sans méchanceté aucune, vos compatriotes sont pas très accueillant mais quand il faut, il faut. »

C’était l’histoire habituelle. Tout s’était bien passé jusqu’à ce que quelqu’un s’intéresse de trop près à Wyl et que le spectre d’une révélation mal venue de son statut d’hybride ne risque de la mettre en péril. Alors Kalyani avait fait leurs paquetages et elles étaient descendues au premier port. « Et vous, Aédan, qu’est-ce qui vous amène dans un rade à pêcheurs ? L’exotisme incroyable de l’endroit ? »

@Aédan Feyrborn

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Kalyani & Aedan

Ses blessures étaient probablement plus sérieuses qu’il ne l’imaginait, mais il avait largement l’esprit embrumé, voyait presque flou et n’était pas en mesure de raisonner convenablement : « Si vous le dites ! » Il se montrait impertinent certes, mais c’était plus une maladresse qu’une véritable moquerie de ses conseils. Elle avait probablement raison et son équipage aurait tôt fait dès le lendemain de lui rappeler de se soigner.

Aédan se montra curieux sur les origines prétenduemment osharrienne de la jeune femme. Ce qu’elle confirma rapidement tout en soulignant le mot bâtard. Lui était né dans une famille ducale, néanmoins il ne se permettrait pas de juger qui que ce soit en fonction de sa naissance. Il se savait privilégié, il en avait parfaitement conscience, mais ne considérait pas meilleur qu’autrui. Kalyani avait tout de même l’air d’être un femme avec de la poigne, du caractère mais un code de conduite franc et droit. Pas comme tous ces pirates qu’il mésestimait grandement. Elle était d’Anhaé, par contre il ne connaissait pas la maison rouge, mais cela sonnait probablement comme une maison close…

« Les feyriens sont méfiants en général… pas tous heureusement, » lui ne l’était pas, du moins il ne le montrait pas ouvertement et paraissait être quelqu’un d’assez ouvert et accueillant. Avec la montée en puissance de la piraterie, il devenait cependant plus revêche et rentre dedans, ce qui ne faisait normalement pas partie de son tempérament. La bière le rendait d’ailleurs étrangement bavard ce soir. « En effet, vous commencez pas par le territoire le plus facile pour trouver un boulot… » A son tour elle le questionna sur son itinérance risquée dans une coin malfamé de la ville.

« Vous croyez ? » lui demanda-t-il le sourcil relevé et la chope de bière qui montait à ses lèvres. Il en but une gorgée avant de finalement lui répondre. « Disons que je me suis… égaré ? » l’homme n’avait pas vraiment envie de s’étendre sur les raisons de son comportement presque suicidaire en se baladant dans cette partie infâme de la ville, le rivage bouffé par la piraterie. Ça le dégoutait mais c’était plus fort que lui de foutre son nez là où on ne l’attendait évidemment pas. « Vous faites bien de vous tenir éloigné de ces malfrats, il n’y a jamais rien de bon qui en ressort. » Il avala une nouvelle gorgée de sa bière. « Mais vu que vous m’avez aidé… je peux bien vous aider en retour. » D’un geste vif il posa le verre sur la table.

Son épaule se rappelait à lui, les douleurs commençaient à se réveiller, la bière n’étant pas suffisamment forte pour faire disparaître les maux du corps. Il essaya de s’essuyer la moustache pleine de mousse houblonnée, mais il grimaça. « Ca embauche dans le coin, je connais peut-être quelqu’un qui cherche du monde… » Il pensait à sa cousine Neïa Feyrborn. Mais avant de lui donner son nom il devait au moins s’assurer que la jeune femme possédait quelques compétences utiles à l’Echo. Neïa était comme sa sœur il n’était pas là pour lui faire de fausses joies. « C’est quoi votre spécialité ? »

@Kalyani Sìnda

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